Considéré dès le début comme le joyau de Lucerne, le nouveau palace voit le jour au bon moment: au milieu du XIXe siècle, le tourisme est en plein essor et la Ville Lumière devient une destination attrayante, en particulier pour la noblesse française, l’aristocratie russe et la classe supérieure britannique. Cette clientèle mondaine, toutefois, a des attentes auxquelles l’hôtellerie n’est pas habituée. En outre, les voyageurs ont de bien plus grandes exigences que lorsqu’ils sont chez eux. Les hôteliers y répondent en créant un univers raffiné et discret, un microcosme dédié au luxe.
À partir de 1870, le colonel Maximilian Pfyffer von Altishofen, maître d’ouvrage, dirige le Grand Hotel National. Ayant grandi dans un château, l’illustre commandant sait ce qu’attendent ses clients distingués. Sept ans plus tard, César Ritz prend la direction de l’établissement. Il pose alors la première pierre d’une culture hôtelière élégante et de tradition. Ce Valaisan né à Niederwald dans le district de Goms semble avoir un véritable don puisqu’il dirigera plus tard, avec tout le succès qu’on lui connaît, le premier Hôtel Ritz à Paris. Celui que le prince de Galles, le futur roi d’Angleterre Édouard VII, avait baptisé le «roi des hôteliers» apporte à la culture hôtelière de Lucerne une élégance et une perfection qui est aujourd’hui encore un modèle.
En 1881, un nouveau maître vient accroître encore la renommée du Grand Hotel National. Le grand chef français Auguste Escoffier met désormais son art au service des palais «délicats» de l’aristocratie − des membres de la maison impériale allemande aux maharadjas indiens, sans oublier Sissi, l’impératrice Élisabeth d’Autriche. Pour couronner le tout, il propose régulièrement à la clientèle ses propres créations: homard Thermidor, volaille à la Derby ou poire belle Hélène sont célèbres dans le monde entier.
«La perfection de l’art doit aller de pair avec la simplicité»: telle est la devise révolutionnaire des deux grands gastronomes. Pour César Ritz, cela signifie: adieu les rideaux pompeux et les formules de courtoisie ampoulées. Avec des couleurs claires, des décorations florales et un service attentionné et personnel, il entend faire des clients de l’hôtel «des amis de la maison».
Près d’un siècle plus tard, en 1976, l’architecte Umberto Erculiani acquiert le Grand Hotel National. Au fil des années, il rénove entièrement le palace avec une attention pour chaque détail. Dans ce contexte, il construit 22 résidences pour locations de longue durée dans l’aile ouest du bâtiment.
Aujourd’hui, le Grand Hotel National est un hôtel 5 étoiles vivant, au cœur de la ville, comptant 41 chambres et suites. Il abrite en outre 22 résidences, des bureaux des plus modernes, cinq restaurants et un bar, deux salles de bal, des salles de conférence et un étage spa avec sauna.
Une nouvelle clientèle cosmopolite donne vie à ce décor grandiose et apporte une nouvelle grandeur à l’établissement. Toute personne qui fait l’expérience du mariage entre tradition de légende et modernité raffinée est irrémédiablement conquise.
Umberto Erculiani a toujours pu s’appuyer pleinement sur le soutien de sa femme, Elisabeth Erculiani Tanner, qui a en outre élevé leurs deux fils Umberto et Raimondo.